« Des travailleurs étrangers bien formés peuvent compenser le sourire mauricien, » déclare Désiré Elliah
Opérer un établissement avec un effectif réduit, c’est risquer de compromettre le sourire mauricien. Tel est l’avis de Désiré Elliah, qui a obtenu un deuxième mandat en tant que président de l’Association des Hôteliers et des Restaurateurs de l’ile Maurice (AHRIM). Il intervenait lors de la 49e assemblée générale de l’association le mercredi 26 octobre, à l’hôtel Sugar Beach à Flic-en-Flac.
«Nous risquons de rater le coche, en n’offrant pas aux visiteurs… ce service d’excellence qu’il vient chercher. Un service d’excellence veut dire une main d’œuvre en quantité suffisante », déclare-t-il. Aujourd’hui, poursuit-il, les hôtels travaillent tous, sans exception, avec 10 % à 15 % de personnel en moins. « Cela se ressent forcément sur cette excellence qu’attendent nos visiteurs. Un service d’hôtel de luxe, c’est un ratio de trois personnes pour une chambre. On est loin du compte aujourd’hui », fait-il ressortir.
Pour Désiré Elliah, c’est un fait que le marché ne produit pas assez de talents. En 20 ans, alors que le nombre de touristes a doublé, il y a eu un déclin démographique. Notre éducation nationale a ainsi produit moins d’éléments. « Les quelques jeunes qui sortent de l’école hôtelière sont vite absorbés par le marché étranger. Quant aux talents qui restent, ils risquent de faire l’objet d’une surenchère malsaine. Car nous tous, opérateurs, nous sommes en train de pêcher dans le même bassin… un bassin qui rétrécit. Au bout du compte, c’est l’image de la destination qui pourrait en pâtir. Nous jouons un jeu extrêmement risqué », prévient Désiré Elliah.
MESURE TEMPORAIRE
Pour le président de l’AHRIM, le temps presse.
« Il nous faut agir vite, pour combler le manque d’effectifs. Cela peut paraître ironique, mais des travailleurs étrangers bien formés en service hôtelier peuvent sauver le sourire mauricien, en soutenant notre personnel à certains postes », fait-il comprendre.
Désiré Elliah précise, toutefois, que le recours à une main-d’œuvre étrangère est une « mesure temporaire ». « D’ici deux à trois ans, la situation devrait s’améliorer, puisque ceux qui partent à l’étranger reviennent la plupart du temps. Et nous aurons eu le temps, d’ici là, d’engager des stratégies qui normaliseront la situation à moyen et long terme », soutient-il.
Or, poursuit-il, la relance, elle, ne peut attendre. « Nous devons saisir les opportunités du moment.
Et nous donner maintenant les moyens de réussir pleinement cette relance. Notre industrie s’affaiblira si le service n’est pas là », conclut-il.
Ces moyens mis en œuvre par les hôteliers pour faire face à la pénurie de main-d’œuvre
• Plus de flexibilité dans les shifts est accordé aux nouvelles recrues afin qu’elles aient la qualité de vie qu’elles recherchent.
• Des postes redessinés, rendus plus polyvalents, pour conjuguer les tâches plus contraignantes à un aspect de l’hôtellerie plus agréable.
• Les bénéfices sont élargis avec des séjours à l’hôtel, des avantages sociaux, pour l’employé et sa famille, des programmes de formation, entre autres.
«Nos hôtels tournent avec 15 % de personnel en moins»
Face au ministre du Tourisme, Steven Obeegadoo, et aux acteurs de l’industrie touristique réunis, la semaine dernière à l’issue de l’assemblée générale de l’AHRIM, le président a souligné que le recours à une main-d’œuvre étrangère sera, espère-t-il, une mesure temporaire.
L’autre dossier urgent, selon lui, pour pérenniser la reprise, est l’amélioration de la desserte aérienne. Désiré Elliah constate que la situation pour les trois prochains mois est plus rassurante, vu que le nombre de sièges consolidés pour décembre 2022 et janvier 2023 permettra aux opérateurs de profiter de l’engouement réel des touristes. Toutefois, au-delà de janvier 2023, l’industrie n’aura aucune visibilité. Il est crucial de maintenir les efforts pour obtenir des vols supplémentaires, qui permettront d’atteindre le 1,4 million de visiteurs d’ici juin 2023. «Le phénomène du Revenge travel durera encore quelques mois. Ensuite, le vent pourrait ne plus être favorable. A en croire le Fonds Monétaire International, la croissance ralentira à la mi-2023.» La solution, selon le président de PAHRIM, passe par des Super connectors et leurs gros-porteurs pour améliorer la capacité et la compétitivité de la destination.